Carrières dans votre région Avis de décèsÉdition Électronique Rabaischocs.com

Recherche

Recherche par terme

Journaliste

Date de parution

_

Catégories

Économique

Retour

24 mars 2022

Carolanne d'Astous Paquet - cdastous@medialo.ca

Assurance-emploi : des Matapédiens sans revenu depuis des mois

SERVICE CANADA

Service Canada

©Photo Capture d'écran

Le bureau local de Service Canada multiplie les demandes et les questions des chômeurs depuis quelques mois.

Comme partout ailleurs en province, des dizaines de chômeurs matapédiens sont incommodés par les interminables délais de traitement chez Service Canada, les privant de leurs prestations d’assurance-emploi.

Comme des milliers d’autres travailleurs, des Matapédiens sont tombés dans les failles du système de Service Canada. Votre hebdo local est allé à la rencontre de quatre prestataires d’assurance-emploi affectés par la situation. Parmi ces derniers, trois d’entre eux n’ont toujours rien reçu depuis décembre dernier, alors qu’un des interviewés s’est tiré d’affaires après deux mois d’attente.

« Du Bloc Québécois, je suis le bureau qui reçoit le plus de demandes. Nous avons reçu un important volume d’appels et de demandes en décembre et janvier […] Dès le moment où les délais sont trop importants, c’est une solution d’appeler un député puisque nous avons une ligne directe avec les fonctionnaires », indique la députée bloquiste d’Avignon-La Mitis-Matane-Matapédia, Kristina Michaud. D’ailleurs, Kristina Michaud estime avoir réglé plus de 200 dossiers d’assurance-emploi depuis décembre dernier, dans l’ensemble de sa circonscription.

Selon le témoignage d’une porte-parole de l’Association pour la Défense des Droits Sociaux de La Matapédia, basée à Amqui, les délais de traitement des dossiers d’assurance-emploi relèveraient de plusieurs dysfonctions fédérales, dont le manque de main-d’œuvre et la surcharge de travail qu’aura occasionnée le piratage de données chez Service Canada. En effet, Service Canada a été la cible de pirates informatiques ces derniers mois, une attaque qui découlerait du vol de données détecté chez Desjardins en 2019, selon des sources fiables.

Les malfaiteurs seraient parvenus à usurper l’identité de plusieurs chômeurs, en infiltrant le système de données de l’agence fédérale. Dans plusieurs cas, ils ont réussi à mettre la main sur les montants dus aux prestataires d’assurance-emploi, les privant alors de tout revenu. C’est d’ailleurs le cas d’un travailleur saisonnier de la région, qui a préféré garder l’anonymat. Ce dernier n’a toujours rien reçu depuis le 12 décembre dernier. Après de multiples appels et visites au bureau local de Service Canada, le père de famille a appris dernièrement que son dossier était transféré au département d’enquête, puisqu’il aurait été victime de fraude.

Des situations d’endettement

Il y a deux semaines, on lui avait promis de l’avancement dans son dossier chez Service Canada. « Une agente m’a dit, t’es rendu à la dernière étape. Mais la dernière étape, personne ne sait combien de temps elle peut durer », laisse-t-il entendre. Toujours sans revenu depuis bientôt 5 mois, le Matapédien admet avoir dû utiliser une marge de crédit pour subvenir aux besoins de sa famille. « J’ai vu un père de famille qui pleurait au bureau de chômage », se désole-t-il, témoin de la détresse de certains.

Pour pallier l’absence de revenu entrant, la plupart des personnes interviewées se sont tournées vers une marge de crédit ou encore une carte de crédit. Les frais d’intérêts engendrés par ces délais administratifs pèsent lourd. Pour certains, c’est carrément l’impasse. La seule issue possible est la redirection de carrière.

Redirection de carrière

C’est ce qu’a fait ce jeune travailleur privé de 24 ans, qui a préféré se trouver un nouvel emploi plutôt que d’attendre les prestations dues depuis décembre dernier. Les délais administratifs de Service Canada, cette fois-ci justifiés par le manque de main-d’œuvre, l’auraient poussé au bout du rouleau. « J’ai quitté un domaine que j’aimais, je l’ai sacrifié juste parce que ça ne me tentait plus de me battre », a-t-il déclaré.   

Le même scénario s’est produit pour Myriam Gagné, cette mère de famille de 25 ans qui se retrouve sans revenu depuis le 26 décembre dernier. Son dossier ferait l’objet de « calculs spéciaux » puisqu’elle aurait bénéficié de prestations du Régime québécois d'assurance parentale (RQAP), selon les informations que lui a transmis Service Canada. Une situation qu’elle juge inacceptable. « Ce qui n’a aucun bon sens, c’est que mes collègues ont vu leur dossier réglé après deux semaines. De mon côté, je me retrouve pénalisée parce que j’ai eu un enfant ? », déplore la jeune maman. « J’ai beau avoir un coussin financier, ce n’est pas viable de vivre avec seulement un salaire pour une famille de trois », poursuit madame Gagné.

Ce n’est pas faute d’avoir essayé, Myriam Gagné prend les moyens nécessaires pour faire avancer les choses. Hélas, elle se bute aux même réponses préformatées depuis des mois. Son dossier ne serait pas jugé prioritaire. Questionnée sur le sujet, la députée Kristina Michaud confirme que Service Canada a dû établir un ordre de priorité dans le traitement des demandes et des paiements d’assurance-emploi. « Il y a un certain traitement humanitaire qui entre en jeu, certains dossiers seront traités plus rapidement que d’autres. Les critères sont assez extrêmes, il faut prouver que la personne risque d’être évincée de son logement, ou qu’elle a recours aux services de banques alimentaires par exemple. »

 

Pressions politiques

Exténuée, Myriam Gagné souhaite évidemment que son dossier soit réglé rapidement. Mais elle ne peut s’empêcher de penser aux milliers de familles en difficulté éprouvées par cette situation. « Il va falloir que ça bouge, nous sommes des milliers de personnes sans revenu. On est pris pour un numéro. On est tannés de se faire dire, ne vous inquiétez pas, on va traiter votre dossier. Ça suffit les fausses promesses », rajoute Myriam Gagné.   

Kristina Michaud soutient que les pressions se poursuivent du côté du Bloc Québécois. « Nos pressions portent fruit en général, on a demandé à la ministre d’ajouter des fonctionnaires.  La ministre a confirmé qu’il y aurait des effectifs supplémentaires, sans toutefois mentionner une date », affirme la politicienne matapédienne en invitant les chômeurs en difficulté à la contacter. « Nous sommes là pour tenter de faire avancer les dossiers, mais on ne fait pas de magie non plus », conclut-elle.

Kristina Michaud

©Photo Gracieuseté - Pénélope Garon

Notons que les personnes incommodées par une telle situation peuvent également faire appel aux services de l’Association pour la Défense des Droits Sociaux de La Matapédia, basée à Amqui, en sollicitant l’aide des conseillères Chantale et Mélissa. Ces dernières offrent un service d’accompagnement, en collaboration avec Service Canada. Pour obtenir un coup de main, veuillez les contacter au (418) 629-6077.

Commentaires

Inscrivez votre commentaire

Politique d'utilisation Politique de confidentialité

Agence Web - Caméléon Média